Les entreprises ont compris que face à des marchés publicitaires saturés, elles devaient trouver d’autres moyens pour cultiver une image d’entreprises responsables, ce qu’elles font en édictant des « codes de conduites » (CdC) ou autres « chartes éthiques »… Ces outils correspondent à des démarches volontaires des entreprises qui ne sont encadrées par aucune règle. Leurs contenus portent sur des considérations sociales et environnementales qui peuvent être extrêmement vagues, et constituent un catalogue d’intentions que les entreprises indiquent généralement faire respecter elles mêmes, sans regard extérieur.
En dehors de toutes considérations morales, les entreprises semblent avoir un intérêt à prendre en compte les enjeux de responsabilité sociale et environnementale dans leur stratégie de communication vers le citoyen consommateur (« consomacteur »). Dans les CdC, l’affichage de préoccupations éthiques, sociales et environnementales permet en effet de peser dans les choix du consommateur. Ces supports constituent donc pour les entreprises un enjeu de communication commerciale et d’information du consommateur.
L’association Sherpa pose la question de la valeur juridique des CdC. Les entreprises les considèrent comme des engagements qui ne doivent pas emporter obligation, l’association considère qu’ils sont des outils de communication commerciale, et par tant des supports de droit dont la violation devrait pouvoir fonder une action en justice ; autrement dit que les engagements unilatéraux que contiennent les CdC devraient porter obligation.
Aux cotés de populations impactées par des multinationales, Sherpa se penche sur les écarts entre le respect des droits mentionnés dans les CdC et la réalité dans les usines, à la fois dans les filiales et dans les chaînes de sous-traitance. L’idée est de dénoncer un blanchiment d’image, et d’utiliser le fondement juridique des « pratiques commerciales trompeuses » pour réduire cet écart.
Ces questions se posent dans un environnement juridique international complexe, et en partie basé sur du droit « mou », c’est à dire sans force contraignante ni capacité de sanction. En France, l’infraction de « pratiques commerciales trompeuses » inclut l’ancienne notion de « publicité mensongère » (ou de nature à induire en erreur), et les dispositions applicables à la publicité mensongère ont été étendues à toutes formes de pratiques commerciales. Toujours est-il que la pratique dénoncée doit être « commerciale », et « trompeuse », et il est encore extrêmement difficile de caractériser l’infraction.
Pour que ce fondement soit recevable, il faut tout d’abord démontrer la nature commerciale de l’engagement éthique de l’entreprise, c’est à dire que les CdC soient considérés comme des outils de communication commerciale soumis au droit. Pour cela, Sherpa essaie de démontrer que ces codes sont non seulement rendus disponibles et publics, mais qu’ils sont renforcés par des très nombreuses publications et mentions sur le site internet de l’entreprise, notamment durant ses campagnes de communication. D’autre part, il faut démontrer le caractère « trompeur », c’est à dire la volonté de l’entreprise de tromper le consommateur, ce dont l’entreprise se défend encore assez facilement.